La prophétie des Andes : Confidences de James Redfield


Paru dans 35 pays, adapté au cinéma, « La prophétie des Andes » a touché plus de 20 millions de lecteurs. Retour avec son auteur sur les forces qui l’ont guidé.
Samedi 21 novembre, 18h30. La nuit tombe sur l'océan atlantique. Au sein du 4ème symposium international de Biarritz, un événement caritatif organisé par l’Oeuvre Ithurria, la journée a été dense pour tout le monde. James Redfield est fatigué. Cet après-midi, l'auteur américain a donné conférence, signé des livres, discuté avec ses lecteurs. Répondre à une interview ne le tente pas. « 20 minutes », négocie-t-il.
40 minutes plus tard, nous y sommes encore, absorbés par l'énergie propre à certaines rencontres. Né en 1950 en Alabama, James Redfield a étudié la sociologie et les philosophies orientales avant de devenir psychothérapeute, auprès notamment d’adolescents maltraités. Paru en 1993, sa Prophétie des Andes est un roman initiatique, fondé sur la quête en 9 étapes du sens de l’existence. Ont suivi La dixième prophétie, Le secret de Shambala, La douzième prophétie... Ce soir-là, discuter avec lui de la magie de la vie valait bien un coucher de soleil.

La prophétie des Andes met en lumière la notion de synchronicité. Comment est-elle entrée dans votre vie ? 
J. R. : Lors de ma formation de psychothérapeute, j’ai été marqué par la pensée de Carl Jung, inventeur du concept de synchronicité. Moi qui m’intéressais à la spiritualité, j’ai réalisé que les synchronicités étaient la voix de l’esprit. Qu’il y avait une guidance à l’œuvre dans le monde, et que nous pouvions la découvrir. Certains événements que nous croyons dus au hasard ont un sens plus profond. L’intuition nous pousse à nous rendre à tel endroit, à dire ou faire telle chose. Là, des synchronicités se produisent, comme pour valider notre intuition. Bien sûr, il ne faut pas voir des signes du destin à tous les coins de rue ! Il y a synchronicité quand l’événement résonne en nous, quand il prend une signification dans notre vie, quand nous sentons qu’il nous met sur un chemin qui ouvre le champ de notre existence. 

Un exemple personnel à partager ? 
J. R. : J’étais parti dans l’Arizona travailler sur La prophétie des Andes. Je n’arrivais plus à écrire, j’étais en panne d’inspiration. J’avais posé mes bagages à Sedona, un lieu réputé pour ses vortex d’énergie. Un jour, un corbeau est sorti du canyon près duquel je me trouvais, s’est mis à tournoyer au-dessus de ma tête, puis est reparti d’où il venait. J’ai replongé dans mes notes. Peu après, un autre corbeau est sorti du canyon pour voler juste au-dessus de moi et retourner dans le canyon. Intrigué, je suis allé voir. J’ai aperçu une espèce d’arbre de la Bodhi. J’ai décidé de marcher jusqu’à lui. Là, j’ai senti une puissance. Quelque chose s’est ouvert ; à ce moment, à cet endroit, toute la suite du livre m’est venue. Si je n’avais pas été sensible à la signification possible de ces visites de corbeaux, je serais passé à côté. Les synchronicités émergent dans ma vie dans des termes très pratiques, en solutions à des problèmes. 

La spiritualité vous a-t-elle toujours intéressé ? 
J. R. : Enfant, je me posais beaucoup de questions. Pourquoi sommes-nous là ? Pourquoi la vie est-elle parfois si dure ? Pour atteindre sa plénitude, l’humanité n’aurait-elle pas encore un secret à découvrir ? J’ai grandi dans le sud des Etats-Unis, au moment de la lutte pour les droits civiques, dans une famille chrétienne. Mon milieu m’a permis de développer une conscience sociale, mais les réponses apportées par la religion et la philosophie me semblaient trop incomplètes, trop abstraites. J’étais à la recherche d’une vérité plus simple, plus claire et plus concrète, dont je pourrais faire personnellement l’expérience. Mes interrogations exaspéraient mon entourage ; ils ont été heureux de me voir partir à l’université ! J’ai exploré plusieurs voies spirituelles, jusqu’à réaliser que toutes parlaient de la même expérience, et que toutes avaient à apprendre les unes des autres, pour élargir leur compréhension de l’existence. 

Comment expliquez-vous le succès de La prophétie des Andes ? 
J. R. : A 21 ans, j’ai eu la vision d’un livre qui affecterait positivement le monde et traverserait les cultures. J’ai très vite mis ce rêve éveillé de côté – je n’avais jamais rien écrit et surtout, je n’avais rien à apporter ! Mais je n’ai pas oublié. Puis les synchronicités ont commencé à me pousser vers la thérapie, puis vers l’écriture. « Wouah, ai-je pensé, c’est en train d’arriver. » A partir de là, je me suis mis à poursuivre quelque chose, une image derrière la tête. Je n’en mesurais pas la portée, mais je savais qu’il fallait que je le fasse. Combien de fois pourtant ai-je jeté le manuscrit ! Je me disais que ça n’avait aucun sens, que je n’étais pas écrivain, mais le souvenir de la vision m’incitait à poursuivre. Alors j’ai travaillé, travaillé… La prophétie des Andes s’est diffusée très rapidement, sans publicité, juste par bouche-à-oreille. Beaucoup de gens disent que ce livre capture une sensation dont ils ont fait l’expérience. Je n’en revendique pas le mérite : l’histoire et les mots que j’ai utilisés sont le fruit d’une perception intuitive ; ils m’ont été dictés par plus vaste que moi. Un livre est empreint de l’énergie qui l’a engendré. Pour les suivants, j’ai tâché de suivre la même guidance, et de m’inscrire toujours dans l’idée de donner. 

En quoi le lien a l’autre est-il si important ? 
J. R. : Il est possible de faire par soi-même l’expérience d’une expansion d’énergie et de conscience, mais le challenge est de la faire vivre au quotidien. Donner est l’une des clés. Du temps, de l’énergie, de l’argent, une écoute… Quoi que ce soit qui puisse aider les autres. Je ne parle pas de donner par devoir, ni de se sacrifier ou de faire tout à la place des autres, mais de laisser libre cours à cet élan du cœur, à cette sensation de disposer de quelque chose dont quelqu’un a besoin. Cette inspiration à donner est une source d’énergie et de bien-être ; c’est le moteur qui nous soutient. Lorsque j’ai besoin de me reconnecter, je sors et je vais parler aux gens, ou je pars marcher dans les bois. La nature a aussi le pouvoir de me relier à ma source intérieure. 

Quelle expérience ordinaire vous semble la plus extraordinaire ? 
J. R. : La couleur. Se balader et remarquer la beauté de notre environnement est une forme d’ouverture de conscience. La capacité à percevoir pleinement toutes les couleurs du monde se cultive. C’est une évolution spirituelle, une vision éveillée de l’ordinaire. Au départ, il faut en poser l’intention. Puis, petit à petit, quelque chose de plus grand nous envahit. Quel que soit le nom que nous lui donnons, l’important est de faire l’expérience de ce divin en nous. Cette présence est là ; nous la laissons marcher à nos côtés, nous en prenons soin quand nous entrons dans une pièce. Cette attention nous porte, et aide aussi les autres à se tourner vers la présence. 

Etes-vous optimiste pour le monde ? 

J. R. : Nos sociétés doivent avancer vers un équilibre entre leurs forces yin et yang, l’action et la réception, la force créatrice et l’ouverture du cœur. Le temps que nous mettrons à parvenir à un monde meilleur et plus spirituel dépend de nos choix personnels à rechercher cette expérience et à la cultiver dans nos vies. L’éveil et la réforme ne peuvent avoir lieu que sous la forme d’une contagion. Ce n’est pas un mouvement, c’est un métamorphose individuelle, partagée par de plus en plus de gens.





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