Vers la fin de l'obligation vaccinale en France?


La vaccination doit-elle rester obligatoire en France ? Le Conseil constitutionnel répondra le 20 mars à cette question sensible, posée par un couple de l’Yonne qui a déposé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur le sujet le 15 janvier. L’audience s’est tenue mardi 10 mars face aux juges constitutionnels, dans une salle comble.



Marc et Samia Larère ont été convoqués devant le tribunal correctionnel d’Auxerre pour avoir refusé de faire vacciner leur fille aînée – aujourd’hui âgée de 3 ans – contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite (DTP) et s’être ainsi soustraits à leurs « obligations légales », « compromettant la santé, la moralité ou l’éducation » de leur enfant. Le couple encourt deux ans de prison et 30 000 euros d’amende. Les jeunes parents dénoncent le caractère toxique de certains adjuvants contenus dans les vaccins obligatoires.

Le tribunal correctionnel ayant transmis la QPC à la Cour de cassation, qui l’a elle-même transmise au Conseil constitutionnel, les Sages doivent se prononcer sur la conformité de l’obligation de vaccination, inscrite dans le code pénal et le code de la santé publique, à la Constitution de 1958. Celle-ci inscrit dans son préambule le droit à la santé. Mais pour l’avocat de la famille Larère, Me Emmanuel Ludot, le droit à la santé est aussi celui de ne pas se vacciner.

« Aucune preuve scientifique »

Me Ludot décrit ce dossier comme « paradoxal et atypique ». « D’habitude, les poursuites sont mises en place contre les parents pour des vacances éducatives, dont l’absence de vaccination n’est qu’une composante, plaide-t-il. Or, dans le cas présent, ces parents sont d’une telle vigilance qu’ils ont décidé de ne pas vacciner leurs enfants. »

Assis sur sa chaise, Marc Larère, qui ne peut intervenir, trépigne. Son avocat, lui, ne faiblit pas : « Les trois maladies contre lesquelles est censé agir le vaccin ont disparu en Europe depuis de nombreuses années et les dérives sont telles que la balance bénéfice-risque ne penche pas en faveur des enfants. De plus, il n’y a aucune preuve scientifique que l’éradication de ces maladies soit le fruit de la vaccination de masse. »

L’avocat de la famille Larère a ensuite mis en avant les risques de contracter des effets secondaires après l’injection : « On nous dit que le vaccin est gratuit et que les familles sont indemnisées en cas de problème. C’est bien gentil mais cela ne ramènera pas nos enfants à leur état normal. » Dans une salle attentive, la conclusion de Me Ludot ne fait aucune ambiguïté. « Les parents doivent être libres de choisir de vacciner ou non leurs enfants. Nous ne sommes pas dans une République rouge ou noire. Il faut faire de la vaccination l’exception, et non l’obligation, pour être en phase avec notre époque et avec les progrès de la science », argue-t-il avant de rejoindre son siège.

Face à cette plaidoirie, les arguments du représentant du premier ministre, Xavier Pottier, sont plus techniques. « La vaccination obligatoire sert à protéger la société des maladies graves et dangereuses », affirme-t-il. Citant un chiffre de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), il rappelle que les vaccins permettraient d’éviter « près de 3 millions de décès chaque année dans le monde ».

Il rappelle aussi que, si cette obligation de vaccination est bien considérée comme une « ingérence dans le droit de la vie privée » par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), cette ingérence est estimée « justifiée afin de protéger les personnes » par l’Union européenne. Sa conclusion est sans surprise : « Les dispositions contestées sont conformes à la Constitution. »

A l’issue de l’audience, Me Emmanuel Ludot n’était pas surpris par la position du gouvernement. « C’est la ligne du parti [socialiste] mais le texte doit être amélioré », confie-t-il. Marc Larère, lui, veut garder espoir : « Je n’ignore pas la loi, j’essaie de me comporter comme un bon père de famille donc je suis confiant, bien entendu. »

« Tentés de contourner le droit »

Accompagné de Jacques Bessin, le président de l’Union nationale des associations citoyennes de santé (Unacs), qui a choisi et paie l’avocat du couple icaunais, M. Larère prévient : « Dans le pire des cas, nous continuerons le combat mais les conséquences pourraient être dramatiques. Les citoyens seront davantage tentés de contourner le droit en trichant, autrement dit en falsifiant des certificats de vaccination, comme cela existe déjà. »

Le jour de l’audience correctionnelle, la ministre de la santé, Marisol Touraine, avait rappelé le caractère « absolument fondamental » des vaccins « pour éviter les maladies ». « Il y a un mouvement qui me préoccupe en France de méfiance, de défiance même vis-à-vis des vaccins (…) La liberté s’arrête là où commence la santé publique et la sécurité de l’ensemble de la population », avait-elle ajouté.

Début septembre, le Haut conseil de la santé publique, qui conseille le ministère, a estimé que le maintien ou non de « l’obligation vaccinale en population générale » relevait « d’un choix sociétal méritant un débat que les autorités de santé se doivent d’organiser ».

Source : http://www.lemonde.fr

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