M. le maire est millionnaire: comment l'élite politique corrompue a pillé l'Espagne


La petite ville de la Muela, dans le nord de l’Espagne, était probablement typique de ce qui se passait à une certaine époque dans les petites communes. Musée de l’huile d’olive, musée du vent, musée de la vie, un stade de 25.000 places, un zoo riche d’une volière d’oiseaux exotiques et une arène, étaient les fleurons que la maire de cette petite ville de 5.000 habitants, María Victoria Pinilla, avait fait édifier. 

Pendant son mandat, elle s’était elle-même enrichie à titre personnel. Mais elle a récemment été rattrapée par le scandale de corruption qui frappe la classe politique espagnole. Les enquêteurs ont calculé qu’elle et les membres de sa famille avaient accumulé environ 18 millions d’euros. La quantité d’espèces retrouvée chez elle était tellement importante (il y en avait pour près de 370.000 euros), qu’ils ont dû emprunter une machine à compter les billets d’une agence bancaire voisine pour en calculer le total.

Pendant des décennies, la corruption était acceptée comme une fatalité dans le sud de l'Europe. Cependant, depuis la crise, les projets ont été interrompus, comme les flux de cash, et l’ampleur de cette corruption a été révélée au grand jour, suscitant l’indignation d’une population contrainte de se serrer la ceinture en Espagne, en Italie, en Grèce et au Portugal, explique Suzanne Daley dans le New York Times. La classe politique et les gouvernements pâtissent de ces scandales de corruption qui sapent leur crédibilité et les déstabilisent.

La corruption n'est pas responsable de la crise à proprement parler, précise Daley, mais les pays qui en souffrent devront l’éliminer pour se muer en sociétés modernes dotées d’économies compétitives et performantes.

Les experts considèrent que la Grèce et l'Italie sont encore plus corrompues que l'Espagne, mais le niveau de corruption espagnol n’en est pas moins impressionnant. Les juges mènent l’enquête sur un milliers d’officiels allant de maires de petites villes, à l’instar de Pinilla, jusqu’à des membres de cabinets du gouvernement. Le premier ministre Mariano Rajoy est lui-même soupçonné d'avoir reçu des pots de vin, et la famille royale aussi fait l’objet d’enquêtes pour des soupçons de corruption. Selon certains, ce n’est qu’un début. Le système politique espagnol donne un énorme pouvoir aux autorités locales, qui ont toute latitude pour accorder des marchés et rezoner les terrains. Ils peuvent décider de la signature de contrats pharaoniques, et se servir au passage.

En Espagne, dans beaucoup de cas, l’argent était destiné à leur parti politique, et l’on a retrouvé peu de cas d’enrichissement personnel aussi patent que celui de Pinilla.

Des discussions sont en cours pour réformer les lois de transparence et de financement des partis politiques, augmenter les peines encourues pour les affaires de corruption et renforcer l’indépendance des commissaires aux comptes. Mais les experts observent que tout ceci risque de rester lettre morte avec le système judiciaire actuel en panne de moyens, et qui met des années à résoudre les affaires de corruption.

Source : express.be

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