Consommation d'aliments industriels et risques de cancer seraient liés


Une hausse de 10% de la consommation de nourriture ultratransformée augmenterait le risque de développer un cancer de 12%, d'après une nouvelle étude française ayant suivi près de 105.000 participants sur 8 ans.
La consommation de nourriture industrielle "ultratransformée" est corrélée à une augmentation du risque de cancer, en particulier de cancer du sein, d'après une étude française conduite auprès d'environ 105.000 Français et publiée jeudi 15 février 2018. Un lien avéré mais dont la relation de cause à effet reste à démontrer. L'étude, appelée NutriNet-Santé, repose sur des questionnaires remplis sur internet entre 2009 et 2017 par des participants dont l'âge médian approchait 43 ans.

"ULTRATRANSFORMES". Selon l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), le groupe des "aliments ultra-transformés" comprend tous les produits alimentaires principalement ou entièrement constitués de sucre, de matières grasses et d'autres substances non utilisées dans les préparations culinaires telles que les huiles hydrogénées et les amidons modifiés, et les produits transformés avec ajout de conservateurs autre que le sel (comme les nitrites). Par exemple, les pains et brioches industriels, les barres chocolatées, les biscuits apéritifs, les sodas et boissons sucrées aromatisées, les nuggets, les soupes instantanées, les plats tout prêts...
+10% de consommation d'aliments ultratransformés = +12 % de risque de développer un cancer

Quelques études avaient déjà observé une association entre la consommation d'aliments ultra-transformés et "une incidence plus élevée de dyslipidémie chez les enfants brésiliens et à des risques plus élevés de surpoids, d'obésité et d'hypertension chez les étudiants universitaires espagnols", précisent les auteurs de l'étude. Dans cette étude, les chercheurs ont analysé les réponses d'une série de questionnaires sur les consommations diététiques quotidiennes remplie tous les 6 mois pendant les 2 premières années par les 104.980 patients de l'étude. Ils ont ensuite établi la moyenne des apports alimentaires des participants et les ont considérés comme leurs apports alimentaires habituels de référence pendant les 8 ans de suivi. Résultat, les scientifiques ont fait état de 2.228 cas de cancer, dont 108 mortels et 739 du sein sur la période et la population étudiées. Ils ont ainsi constaté qu'"une augmentation de 10% de la proportion d'aliments ultra-transformés dans l'alimentation était associée à des augmentations significatives de 12% du risque global de cancer et de 11% du risque de cancer du sein".

"Plus spécifiquement, les graisses et sauces ultratransformées et les produits et boissons sucrées étaient associés à un risque accru de cancer globalement, et les produits sucrés ultratransformés étaient associés à un risque de cancer du sein", ont précisé les chercheurs. Leurs "hypothèses" visent "la qualité nutritionnelle généralement plus faible" de ces produits, trop gras, trop caloriques et/ou trop salés, et "

la vaste gamme d'additifs" qu'ils contiennent. Par ailleurs, "la transformation des aliments et en particulier leur cuisson produisent des contaminants nouvellement formés", s'inquiètent-ils. Dans un éditorial, le BMJ a souligné que l'étude ne proposait qu'une première observation, qui "mérite une exploration attentive et plus poussée". "Le lien de cause à effet reste à démontrer", a acquiescé l'Inserm, qui a financé l'étude avec d'autres institutions publiques françaises.

Ne pas confondre corrélation et conséquence

Si l'étude parle d'"association" entre la consommation d'aliments ultratransformés et le risque de cancer et ne dit pas que l'un semble être la cause de l'autre, c'est parce que la relation de cause à conséquence n'a pas encore été démontrée. Il serait dans ce cas possible qu'une partie de l'augmentation de risque de cancer observée découle d'autres paramètres, tels que les mauvaises habitudes que les gens qui mangent beaucoup de nourriture industrielle sont plus susceptibles d'avoir. Ainsi, selon la revue, les 25% ayant la plus forte consommation d'aliments ultra-transformés "avaient tendance à être plus jeunes, fumeurs, moins instruits, à avoir moins d'antécédents familiaux de cancer et faire moins d'activité physique". De plus, le cancer étant une pathologie susceptible de survenir sur le long terme, les auteurs prévoient de continuer le suivi sur les 10 années à venir afin d'actualiser les résultats.

Les plats industriels sont de plus en plus présents dans l'alimentation de toutes les régions du monde. Les chercheurs de NutriNet-Santé indiquent que leur part dans le régime des Français n'est pas quantifiée. Ils citent une étude de 2016 de l'agence alimentaire Anses montrant que quand ils mangent chez eux, la moitié de leurs aliments transformés proviennent de l'industrie, un tiers sont "faits maison" et le reste artisanalement. L'Organisation mondiale de la santé désigne l'"augmentation de la consommation d'aliments très caloriques riches en lipides" parmi les principales causes de la progression de l'obésité, à l'origine de graves problèmes de santé publique.

D'après l'Inserm, l'équipe de recherche poursuit ses travaux en lançant un nouveau programme sur les additifs alimentaires, afin d'en évaluer leurs effets potentiels sur la santé et la survenue de maladies chroniques. Pour participer au recrutement, il suffit de s'inscrire en ligne (www.etude-nutrinet-sante.fr) et de remplir des questionnaires, qui permettront aux chercheurs de faire progresser les connaissances sur les relations entre nutrition et santé et ainsi d'améliorer la prévention des maladies chroniques par notre alimentation.

Source : https://www.sciencesetavenir.fr

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