Ecotaxe : "Le contrat avec l'Etat français devra s'appliquer"



Ecotaxe : "Le contrat avec l'Etat français devra s'appliquer"

Michel Cornil, vice-président d’Ecomouv, la société chargée de la gestion et de la perception de l'écotaxe et dont l'actionnaire majoritaire (70 %) est l'italien Autostrade, rappelle les termes du contrat qui le lie à l'Etat français. Et entend bien que les clauses de celui-ci soient respectées.

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Jean-Marc Ayrault a annoncé la suspension de l’écotaxe, dont la mise en application était annoncée pour le 1er janvier 2014. Le ministre du budget, Bernard Cazeneuve, a indiqué, jeudi 31 octobre, que "cela ne durerait pas des mois". Quelle est votre réaction ?


Michel Cornil. Nous attendons avec attention que soit précisée la date à laquelle l’écotaxe entrera en vigueur. Pour le moment, nous continuons à installer le dispositif et ses infrastructures, à implanter et équiper les portiques, à enregistrer les poids lourds. Le gouvernement a choisi de mettre l’accent sur la concertation et de suspendre l’écotaxe. Nous, nous serons prêts pour le démarrage qui était annoncé pour le 1er janvier prochain.

S’agit-il d’une rupture du contrat qui vous lie à l’Etat ? Allez-vous demander des compensations ?

Il y a déjà eu des reports [l’écotaxe devait être appliquée au 1er juillet 2013], car le gouvernement a estimé que les acteurs n’étaient pas totalement prêts, ni Ecomouv ni les autorités, encore moins les transporteurs. Nous avions alors décidé avec l’Etat de nous focaliser sur une mise en place au 1er janvier.

S’agissant de la nouvelle suspension, le contexte est différent. A partir du 1er janvier, comme le système sera opérationnel, l’Etat devra alors nous payer le loyer prévu contractuellement  [230 millions d’euros annuels, "18 millions mensuels", selon le ministre du budget]. Cette somme correspond essentiellement aux dépenses de fonctionnement, frais de personnel, coûts d’entretien du système, tel que le contrôle des capteurs des 173 portiques qui doivent être installés.

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Et si la suspension devenait un abandon ?

Pour le moment, il n’est question que de suspension, même si aucune date n’est avancée. Mais si le système s’arrête, tous les termes du contrat auront à s’appliquer avec les indemnisations prévues, à savoir le remboursement de l'ensemble des frais engagés. Le gouvernement nous a garanti qu’il honorerait les clauses du contrat.

A combien s’élèvent ces frais d'indemnisation ? 800 millions d'euros, comme l’a indiqué Stéphane Le Foll, le ministre de l’agriculture ?

Je ne conteste pas cette somme. Mais, encore une fois, nous œuvrons dans le cadre d’un contrat de partenariat public-privé. Nous restons dans ce cadre et Ecomouv gère, aujourd’hui, la suspension de l’écotaxe avec l’Etat français, une période transitoire donc.

Quelles seraient les conséquences d'une mise en œuvre de l'écotaxe après les élections municipales, une hypothèse plausible? 

La situation n’est, bien sûr, pas la même si la transition n'est que de quelques mois ou si elle dure plus longtemps. Dans ce dernier cas, le gouvernement aurait à payer les mensualités de loyer à Ecomouv pendant plus longtemps. Pour notre part, nous maintiendrions le personnel et tout le système dans l’attente du démarrage. Personne ne sait le temps que le gouvernement veut laisser à la concertation et ne connaît donc le futur de l’écotaxe. Aujourd’hui, le calendrier des réunions de dialogue n’est pas encore précisé.

Cela ne risque-t-il pas d’avoir un effet sur l’enregistrement des camions, nationaux et internationaux ?

Cela est possible. Mais nous n’en savons rien aujourd’hui. Nous en sommes à 109 000 camions enregistrés, 45 000 dossiers en cours de validation, dont près de 30 % de véhicules étrangers [sur un total de quelque 350 000 poids lourds visés]. Depuis début septembre, nous étions sur un rythme de 3 500 enregistrements quotidiens. Celui-ci va peut-être ralentir, mais il nous reste encore les dossiers en attente. Encore une fois, tout va dépendre de la date annoncée pour la mise en vigueur de la taxe.

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Certains s’interrogent sur la société Ecomouv, son capital majoritairement italien, les conditions d’attribution du marché par le précédent gouvernement. Le sénateur socialiste François Rebsamen va même jusqu’à demander une commission d’enquête parlementaire sur la création de votre société ? Que répondez-vous ?

Le capital de la société est détenu à 70 % par Autostrade per l’Italia, une compagnie d’autoroute italienne. En 2011, quatre sociétés françaises sont entrées au capital, à hauteur de 30 % : Thales, Steria, SFR et la SNCF. Ecomouv a remporté un appel d’offres européen de l’Etat français. Un recours a été déposé par un concurrent devant le Conseil d’Etat, qui a validé le choix opéré par l’Etat.

Source : lemonde.fr

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