L’évasion fiscale


L’évasion fiscale  à l’ordre du jour du prochain sommet européen.



Les 27 ministres des finances de l’Union européenne à Dublin le 12 avril

La chasse au secret bancaire est ouverte. Réunis vendredi 12 et samedi 13 avril à Dublin, sous présidence irlandaise, les 27 ministres des finances de l’Union européenne se sont emparés du sujet. Dans un message vidéo, le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, a annoncé que le sujet figurerait à l’ordre du jour du prochain sommet des chefs d’État et de gouvernement européens prévu le mercredi 22 mai prochain à Bruxelles. Évaluant le montant annuel de l’évasion fiscale dans l’UE à une perte de mille milliards d’euros, il a déclaré vouloir que l’Europe mette « à profit la dynamique politique accrue pour régler ce problème crucial ».


LEVÉE PARTIELLE AU LUXEMBOURG

Cette « dynamique politique » a été enclenchée par le Luxembourg, dont le ministre des finances, Luc Frieden, a annoncé la prochaine levée partielle du secret bancaire pour les particuliers à partir de 2015. De son côté, le chancelier autrichien, Werner Fayman, s’est déclaré prêt à négocier la levée dusecretbancaire pour les résidents étrangers bien que sa ministre des finances, Maria Fekter, ait répété le 13 avril qu’elle « se battrait pour le secret bancaire ». Quant au ministre britannique des finances, George Osborne, il a souligné que son gouvernement négociait avec les territoires sous juridiction de la Couronne britannique concernés (Jersey, Gibraltar,..) pour tenter de les convaincre de mettre fin à l’opacité bancaire.

DES DÉCISIONS PRISES SOUS LA PRESSION AMÉRICAINE ET MÉDIATIQUE

Les révélations dans la presse, dites « offshore leaks », sur des détenteurs de comptes dans des paradis fiscaux ont nourri la pression politique sur le sujet. À la suite de ces informations, six États (la France, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, l’Espagne et l’Italie, rejoints par la Pologne) ont écrit à la Commission européenne pour réclamer une nouvelle législation sur le modèle du « Fatca » (Foreign accounts tax compliance act) américain.

Par cette législation adoptée en 2010, les États-Unis imposent sous peu à toutes les institutions financières du monde de leur livrer des informations sur tous les avoirs des Américains, sous peine de lourdes pénalités. Le Fatca, qui permet d’obtenir toutes les informations sur tous les comptes bancaires, les placements et les revenus à l’étranger de tous les contribuables américains, a ainsi fait pression sur le Luxembourg, car il va plus loin que les règles européennes en vigueur.

UN ÉCHANGE AUTOMATIQUE D’INFORMATIONS

La législation européenne est déjà appelée à évoluer. Une négociation est en cours pour réviser la directive européenne de 2003, qui a institué un échange d’informations entre administrations fiscales sur les revenus tirés des intérêts de l’épargne placé dans un autre pays de l’Union. L’objectif de la révision est d’éviter que l’échange automatique d’informations des données bancaires personnelles soit en pratique contourné via des trusts, des fondations opaques ou autres systèmes de prête-nom.
« Je pense qu’on va, en Europe, décider relativement vite d’élargir le champ d’application de la directive épargne et que tous les États membres vont y participer », a estimé le ministre allemand des finances, Wolfgang Schäuble, le 13 avril. Une autre directive, adoptée en 2010, doit élargir cet échange automatique d’informations à d’autres catégories de revenus, notamment les assurances-vie.

OBJECTIF FRANÇAIS DE DÉFICIT À 2,9 % EN 2014

Outre le secret bancaire, la réunion à Dublin a permis aux ministres de la zone euro d’approuver formellement le plan d’aide de dix milliards d’euros à Chypre, que Nicosie devra compléter par 13 milliards de recettes ou d’économies.

Elle a aussi été l’occasion pour le ministre français des finances, Pierre Moscovici, d’annoncer au commissaire européen aux affaires monétaires, Olli Rehn, que la France allait cibler un déficit budgétaire représentant 2,9 % de son PIB (Produit intérieur brut) l’année prochaine. Un objectif que le gouvernement français doit entériner le 17 avril mais que la Commission estime déjà insuffisant.


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