Chypre projette de vendre ses réserves d’or et fait plonger le cours de l’once


Chypre projette de vendre ses réserves d’or et fait plonger le cours de l’once


L’Union européenne a validé le plan d’aide de 10 milliards d’euros à Chypre, mais cela ne serait peut-être pas suffisant.

Le gouvernement chypriote envisagerait ainsi de céder une partie de ses avoirs en or.

Ce projet, déjà évoqué fin mars, a entraîné un décrochage des cours de l’or, vendredi 12 avril. Les analystes pensent que cela pourrait entraîner la même initiative au Portugal et en Italie notamment.
La confusion semble encore régner dans le règlement du dossier chypriote. Vendredi 12 avril, les ministres des finances de la zone euro ont validé le plan de sauvetage de 10 milliards d’euros, destiné à éviter la faillite du pays, sur fond de bataille de chiffres concernant les besoins exacts de l’île. Le vice-président de la commission européenne, Olli Rehn, également chargé des Affaires monétaires, a précisé qu’il n’était pas prévu de relever ce montant.


Des besoins financiers plus importants que prévus.

Cette précision fait suite à l’annonce par Nicosie, jeudi 11 avril, que les besoins financiers de l’île – initialement évalués à 17 milliards d’euros (dont 7 milliards apportés par Chypre) – s’élevaient en réalité à 23 milliards d’euros. Raison invoquée : la dégradation de la conjoncture sur l’île, plus rapide et violente que prévue.

Vendredi, le représentant de Chypre à Bruxelles, Michalis Koumides, a toutefois assuré qu’il s’agissait d’un malentendu et que le président chypriote Nicos Anastasiades avait seulement demandé à Bruxelles l’accélération du déblocage des fonds structurels européens prévus pour Chypre, doublés d’une assistance technique européenne pour les dépenser. Le gouvernement chypriote a néanmoins cru bon de préciser que l’augmentation du coût de son plan de sauvetage n’entraînerait pas de coût supplémentaire pour les déposants de son pays.

Une chose est sûre, Chypre a besoin d’argent frais, et vite. C’est sous cet angle que peut être analysé le projet gouvernemental de vendre les réserves d’or excédentaires du pays. Car cette mesure pourrait contribuer, rapidement, à remplir les caisses publiques. Certes, le gouvernement a rappelé jeudi 11 avril que la décision revenait, in fine, à la banque centrale nationale. Mais un document de la Commission européenne affirme que Nicosie a pris des engagements afin de lever environ 400 millions d’euros par la vente de son surplus d’or, un apport non négligeable.

La possibilité de vendre de l’or a, de fait, déjà été évoquée fin mars, au plus fort de la crise financière dans l’île. Parmi les mesures destinées à sauver le pays de la faillite, le parlement chypriote a en effet voté la création d’un fonds national de soutien à l’économie. Les autorités ont expliqué, depuis le début, que toute contribution à ce fonds serait la bienvenue. Elles ont évoqué des contributions volontaires provenant de la diaspora, mais aussi les futures ressources espérées de l’exploitation de gisements gaziers, découverts au large de côtes chypriotes.

En outre, le gouvernement pensait abonder ce fonds par des privatisations (il a chiffré à 1,7 milliard d’euros les recettes attendues de la vente des entreprises publiques dans les secteurs des télécoms, de l’électricité et du port). L’Église orthodoxe chypriote a, de son côté, affirmé qu’elle envisageait de vendre des terres au profit de ce fonds. Selon les experts de la troïka (FMI, BCE et Commission européenne), le PIB de Chypre pourrait plonger de 12 à 15 % cette année !

La décision chypriote pourrait faire école

C’est également dans ce contexte que la vente d’or avait été évoquée. Cette source de cash pour le gouvernement chypriote pourrait aussi créer un précédent en Europe, dans d’autres pays en difficultés comme le Portugal et l’Italie. L’or représente en effet 90 % des réserves de change du Portugal et 78 % de celles de l’Italie (contre 10 % en Inde, par exemple, à titre de comparaison).

Impossible cependant de voir dans la vente d’or une solution miracle : au cours actuel, les réserves d’or de Rome sont estimées à 95 milliards d’euros (pour une dette publique qui frôle les 1 700 milliards). En outre, la décision revient, légalement, aux institutions monétaires, et non aux gouvernements – qui peuvent cependant exercer des pressions.

Lisbonne, qui a annoncé, vendredi 12 avril, une accélération de sa cure d’austérité, pour compenser la récente invalidation d’une partie de son plan de rigueur par la Cour constitutionnelle, pourrait être facilement tenté. Reste que si plusieurs banques centrales adoptaient l’idée chypriote, cela pourrait faire plonger le cours du métal précieux et réduire d’autant les gains escomptés de cette opération.

L’once d’or fin a plongé brutalement sous les 1 500 dollars à la clôture des marchés, vendredi 12 avril. C’est la première fois depuis juillet 2011 qu’il renouait avec un niveau aussi bas. Les analystes font valoir que le projet chypriote et son effet d’entraînement potentiel sur d’autres pays a sans doute joué dans ce décrochage soudain. Ils citent également la publication d’un mauvais chiffre sur les ventes de détail aux États-Unis.

L’accord des banques centrales sur l’or limite la vente d’or totale à ses signataires à 400 tonnes par an. Pour le moment, les banques centrales achètent plus d’or qu’elles n’en vendent, et ce depuis 2010. C’est la Banque de France qui a réalisé la dernière vente d’ampleur au premier semestre 2009, en vendant près de 18 tonnes.

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