Greffer un corps entier sur une tête, c'est possible ?


Ce projet fou porté par le neurochirurgien italien Sergio Canavero pourrait connaître de nouvelles avancées lors du prochain congrès de l'Académie américaine de chirurgie neurologique en juin 2015.

Greffer le corps complet d'un donneur sur la tête d'un patient ? C'est le projet un peu fou mais tout ce qu'il y a de plus sérieux de Sergio Canavero, neurochirurgien à l'université de Turin (Italie). Celui-ci vient de dévoiler un protocole détaillant la technique chirurgicale permettant de "fusionner" la moelle épinière du donneur avec celle du receveur. 


Un "détail" technique prépondérant pour la crédibilité de l'opération. Surtout, Sergio Canavero est bien décidé à présenter le lancement de son projet à l'occasion du prochain congrès de l'Académie américaine de chirurgie neurologique qui se déroulera en juin 2015 à Annapolis dans le Maryland (Etats-Unis). Et il espère bien convaincre la communauté scientifique de la crédibilité de son protocole.

Nous vous proposons de retrouver ci-dessous l'enquête menée sur cet improbable projet par notre reporter Elena Sender et publiée dans le magazine Sciences et Avenir n°798 en juillet 2013.

"Monstrueux", "impossible", "ridicule", les adjectifs fusent lorsqu’on évoque une "greffe de tête", la transplantation d’une tête humaine (vivante) sur le corps d’un donneur (mort), qui permettrait à des tétraplégiques, par exemple, de recouvrer l’usage d’un corps sain. Pourtant, ce sujet très sensible vient d’être remis sur le devant de la scène par le neurologue italien Sergio Canavero. Ce directeur du groupe Advanced Neuromodulation à Turin (Italie) a en effet publié dans l’obscure revue Surgical Neurology International son projet de première transplantation de ce type, détaillant le déroulé possible de l’intervention. Le chercheur rappelle à cette occasion que cette tentative avait été réussie chez le singe Rhésus par le neurochirurgien américain Robert White, de la Case Western Reserve University (Cleveland, États-Unis), en 1970. Le singe chimérique avait survécu trente-six heures, dont trois éveillé. L’animal disposait de tous ses sens intacts (ouïe, odorat, vision, goût) mais était resté paralysé, la moelle épinière ne s’étant pas reconnectée entre la tête et le reste du corps.

"Aujourd’hui, nous avons les techniques pour accomplir cette reconnexion, assure Sergio Canavero. Des travaux ont montré que des substances chimiques, le polyéthylène glycol (PEG) et le chitosan, induisent la fusion des fibres nerveuses (axones) coupées. Nous pourrions, grâce à cela, reconnecter plus de 50% des axones. Or, d’après la littérature, la connexion de 10% seulement de fibres descendantes (du cerveau vers le corps) de la moelle épinière suffit pour rétablir le contrôle volontaire de la motricité."

Interrogés, les spécialistes restent prudents sur la faisabilité technique de cette greffe inédite. Zohreh Amoozgar, expert en PEG à l’université Harvard (Cambridge, États-Unis), dont les travaux sont cités dans la publication de Sergio Canavero, nuance : "Les chitosan et PEG sont certes capables de connecter les nerfs périphériques avec succès sans perte substantielle de fonction. Néanmoins, pour la moelle épinière, il faudrait y associer des sutures chirurgicales."

Et si le greffon est rejeté ?

Une opération de microchirurgie longue et délicate s’il en est. "Le problème majeur reste le rejet du greffon, commente pour sa part Ignacio Anegon, directeur de l’unité Inserm-Centre de recherche en transplantation et immunologie de Nantes. Les organes principaux du système immunitaire du corps (moelle osseuse, rate et ganglions) réagiront contre le tissu composite (muscles, peau, cerveau…) qui constitue la tête" Résultat dramatique : le corps risque de rejeter la tête ou le cerveau ! La solution passerait par des traitements anti-rejet, bien maîtrisés aujourd’hui. "Mais les greffes ont une durée de vie limitée, poursuit Ignacio Anegon. Au bout d’un temps, variable, les traitements peuvent ne plus suffire. Or, si l’on peut retirer une main greffée lors d’un rejet, on ne pourra pas retirer la tête !" Le directeur de recherche appelle à la mesure : "Il manque des résultats sur une dizaine de singes, avec des traitements immunosuppresseurs, pour voir leur survie à long terme." Il faut aussi tenir compte des freins psychologiques. "La greffe de tête effraie plus que toute autre, ajoute-t-il. Elle dresse dans l’inconscient des barrières issues des mythes, des fantasmes, du monstre de Frankenstein. Pour ma part, je suis cependant partisan de repousser les limites du possible pour aider des gens qui vivent des situations dramatiques." 

L’opération créera une chimère porteuse de l’esprit du receveur mais qui engendrera la descendance du donneur" - Dr Sergio Canavero 


Sergio Canavero met en avant un autre frein éthique : "L’opération créera une chimère porteuse de l’esprit du receveur mais qui engendrera la descendance du donneur." Quoi qu’il en soit, le neurologue estime qu’une fois obtenue l’autorisation d’un comité d’éthique et des fonds débloqués, l’opération prendrait à peine deux ans pour être mise sur pied. Où ? Un indice : "Les Russes m’ont convié cet été à présenter mon hypothèse devant de riches mécènes", lâche-t-il. Déjà, dans les années 1970, Robert White avait été invité par l’URSS. "Mon inspirateur est russe d’ailleurs, souligne Sergio Canavero. C’est Constantin Tsiolkovski, le père de l’astronautique. Il disait que l’impossible d’aujourd’hui deviendra le possible de demain." Un possible qui, s’il devient finalement réalité, risque de faire tourner bien des têtes… 

Commentaires

  1. Anonyme25.3.15

    C'EST DÉJÀ CE QUI SE FAIT AVEC TOUTES LES TÈTES DE G(AR)(OUVER)NEMENTS DU MONDE TRANSMODERNE (VOIR: LE CANDIDAT MANDCHOU!). SAINT DENIS AVAIT PRIS SA TÊTE SOUS LE BRAS POUR SE RETIRER DE CE BAS MONDE!

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